Après s’être assurés que les démons mineurs avaient bien quitté Windenburg – la plupart avaient, semblait-il, croisé la route de Belthelda qui s’était fait un plaisir de les occire en ne laissant rien d’eux derrière elle –, ils avaient tous été transportés à Forgotten Hollow où le soleil brillait avec ardeur sur le Bastion Mirage, la version améliorée de la Tour Mirage. A peine étaient-ils entrés dans le bâtiment que…
—QUOI ?! VOUS PLAISANTEZ J’ESPERE ?!
… Gabriel avait tenté d’expliquer calmement la situation à sa compagne, Cordelia, mais comme il l’avait redouté, elle ne prenait pas du tout bien cette nouvelle… et ne tarda pas à jeter un regard chargé de rage à Margaux qui elle non plus n’en menait pas large.
—Vous… tonna la succube dont la colère était plus que perceptible et qui poussa Jaimie à les inciter à ne pas rester dans son champ de vision. Oser sacrifier mon fils… MON FILS !
—J-je jure que je ne voulais pas ça ! se défendit la magicienne qui ne savait visiblement pas trop comment réagir. Si j-
—Taisez-vous ! Vous avez de la chance que je sache un minimum comment fonctionne ce fichu Jugement et je compte bien aller chercher Eze-
—NON ! Vous y serez prisonnière vous aussi ! Vous croyez que c’est ce qu’il veut pour vous ?
Cette remarque avait suffit à faire réfléchir Cordelia qui, en un coup d’œil à son compagnon, comprit qu’elle n’avait aucun intérêt à agir ainsi sur un coup de tête, cela même si il était que cette situation ne lui plaisait absolument pas.
Toujours extrêmement contrariée, la succube finit par expirer fortement avant de se diriger vers la sortie.
—Cordelia ? demanda Gabriel, inquiet. Qu’est-ce que t-
—Je vais casser la gueule de Straud pour me calmer ! s’exclama l’amatrice de malédiction en faisant calquer ses talons sur le sol de pierre. Je ramènerai Flamberge et Sedna quand j’aurais terminé donc m’attendez pas pour dîner !
—Très bien…
Cordelia allait sortir… puis revint sur ses pas pour attraper Sirius et l’embarquer de force avec elle en le tirant par une oreille, cela sous les regards consternés de tout le monde et les cris de douleurs de l’incarnation de l’air qui semblait en avoir plus qu’assez que l’on s’en prenne à ses oreilles pour un oui ou pour un non – intérieurement, Gabriel et Margaux savaient très bien que les trois incarnations ensemble ne pourraient rien apporter en magie à Cordelia mais ce n’était pas dit que Straud soit au courant de ce fait…
Après avoir excusé sa compagne, Gabriel leur fit signe vers la salle à manger et chacun s’installa à une chaise. Le magicien n’était clairement pas d’humeur bavarde, tout comme Eurydice et Lucinda ainsi que Dimitri dont le regard violine allait d’une personne à une autre, attendant clairement de savoir lequel d’entre eux allait entamer la discussion et briser ce silence qui devenait désagréable. Un léger raclement de gorge finit par se faire entendre du côté de la magicienne qui se tourna vers sa voisine de table.
—Nous n’avons pas eu le temps de nous présenter vous et moi, fit remarquer Margaux à Jaimie qui sourit en entendant cela. Mais j’imagine que vous me connaissez déjà grâce au Téméraire…
—Je m’excuse d’avoir peint votre portrait en douce à Avalon mais il aimait avoir un portrait des femmes qu’il aimait, cela même s’il a dû en cacher quelques-uns à cause de l’Eglise, répondit la muse à la fois amusée et nostalgique. Je peux en faire un plus flatteur si vous le désirez ? Maintenant que je vous ai vue de près, ce ne sera plus un souci.
—Cela n’a pas d’importance pour moi. En revanche, la proposition devrait séduire Sirius, même s’il semble s’être très bien adapté aux nouvelles technologies.
—Ma sœur aussi s’y est très bien faite mais j’avoue que je suis un peu moins à l’aise qu’elle avec la photographie. Je préfère le dessin.
Toutes deux se parlaient avec une certaine légèreté qui allégea l’ambiance lourde régnant dans la pièce. Même s’ils restaient tous sous le choc des derniers évènements, cela ne devait pas les empêcher de parler librement, ce que les deux magiciennes semblaient avoir bien compris.
—Pour revenir à des sujets plus sérieux, laquelle de vos sœurs est encore en vie ? demanda Margaux, cette fois-ci sur un ton grave. J’avais cru comprendre qu’Elysia avait été très affecté par la chute d’Avalon…
—C’est exact, confirma Jaimie qui perdit son sourire. J’ai pu y échapper uniquement parce que j’étais dans l’Epreuve en train de cacher une relique et quand j’en suis sortie, presque toutes mes sœurs avaient été décimées. J’ai retrouvée Fairy par hasard dans les montagnes mais elle est restée plus d’un siècle dans le coma. Quand elle s’est réveillée, elle a été incapable de me dire ce qui lui était arrivé et comment elle était devenue rousse du jour au lendemain.
—Rousse ? firent Gabriel et Margaux, aussi intrigués l’un que l’autre avant que la sorcière ne reprenne la conversation. Je sais que je l’ai vue la veille de la Chute d’Avalon et, si nous parlons de la même muse, elle était blonde ce jour-là, j’en suis certaine. Il est possible que, dans la confusion, je ne me sois pas aperçue qu’elle était dans ma tour quand je créai les Tomes mais cela n’explique pas qu’elle ait atterri ailleurs…
—Je vois ce que vous suspectez…
En voyant que les yeux bleus de la muse étaient en train de la fixer, Eurydice ne parvint pas à comprendre ce que cela voulait dire… puis elle réalisa que ce qu’elle regardait, c’était ses cheveux roux, faisant que la jeune femme se demandait en quoi c’était si important.
—Pour vous expliquer simplement à tous, fit Jaimie qui avait dû sentir qu’elle se posait des questions. Le sort qui permet la résurrection est une flamme que l’on invoque et dans laquelle l’âme que l’on veut réincarner doit être jetée, la débarrassant de toute corruption et de tous ses souvenirs afin de lui permettre de commencer une nouvelle vie. En plus d’avoir un prix lourd à payer, ce sort a un effet secondaire connu : celui qui est réincarné voit ses cheveux roussir dans sa nouvelle existence. C’est peut-être en partie pour cela que beaucoup ont cru, à tort, qu’une chevelure rousse indiquait que la personne pratiquait la magie.
—Si on part de ce principe, cela voudrait en fait dire que tous les roux ont eu une vie antérieure ! s’exclama Eurydice en pensant à sa mère et à son frère.
—Sauf que vu le coût élevé de ce sort, c’est fort peu probable. Peu de magiciens acceptent de payer si cher pour quelqu’un d’autre. Le seul sort qui a un coût proche voire équivalent est celui d’immortalité mais au jour d’aujourd’hui, je ne connais plus qu’une personne pouvant le jeter et ses prestations sont réputées pour être coûteuses…
—Certains sorts puissants nécessitent des sacrifices je crois, souligna Lucinda qui avait été attentive à la conversation. Beaucoup pensent à des sacrifices animaux ou humains mais j’imagine que cela est faux.
—Je confirme. C’est plutôt de la magie ou de puissants artefacts que l’on paye car en général, si l’on sacrifie une vie, celle-ci doit être précieuse aux yeux de celui qui va bénéficier du sort. Si ce n’est pas le cas, le sacrifice n’aura servit à rien.
C’était logique : l’échange devait être équivalent ou bien il n’aurait aucune valeur. Par contre, elle avait beau chercher dans les souvenirs d’Avalon qu’elle avait récupérés, elle était certaine de ne pas avoir aperçu Fairy dans la tour de Margaux. Etait-elle dans un endroit où elle ne pouvait pas la voir ?
—Maintenant que j’y repense, fit Gabriel, l’air grave. Il me semble qu’il existe des moyens d’entrer dans le Jugement sans subir ses effets. Peut-être que je me trompe mais il me semble bien que Fairy possède le Camée de Perséphone et que cette relique d’Elysia pourrait nous être utile.
—Si ma sœur ne l’a pas encore perdu…
Tandis que Jaimie soupirait d’agacement, Eurydice et les autres comprirent soudain qu’ils avaient peut-être une chance de sortir Ezekiel de ce piège avant que la sentence ne tombe. Mais… comment au juste ?
—Est-ce que c’est vrai ? questionna la jeune femme. On peut entrer dans le Jugement sans subir ses effets ?
—Si on veut oui… répondit la muse avec gravité. Pour le Camée de Perséphone, seule Fairy peut s’en servir pour aller dans le Jugement car cette relique ne permet d’aller que dans les lieux déjà visités par son porteur. L’autre solution aurait été d’avoir l’une des trois clés faites pour ouvrir le Jugement mais le hic, c’est qu’elles ont disparues depuis très longtemps…
—C’est pour cela qu’il fallait les trois alignements rares, en conclut Lucinda.
—Tout à fait. Le Jugement et l’Epreuve ont été créés par trois dieux : Isis, Athéna et Loki. Chacun d’eux détenait une clé pour accéder à ces lieux mais pour celles de l’Epreuve, deux d’entre elles ont été détruites à coup sûr et la dernière, celle d’Asgard, a été perdue durant le Ragnarök donc la logique voudrait que ce lieu ne soit plus accessible… Seulement, je me suis aperçue qu’il apparaissait parfois à certains endroits donc je suspecte quelqu’un d’avoir trouvé cette clé et de s’en servir de temps à autres. Pour ce qui est de celles du Jugement, je ne sais pas ce qui est arrivé à celles d’Isis et de Loki mais celle d’Athéna avait été confiée à Calliope… et elle ne l’avait plus sur elle quand j’ai trouvé son corps à Elysia. Or, avoir une de ces clés sur soi protège des effets du Jugement.
La clé avait donc très certainement été volée… mais par qui ? La personne qui tirait les ficelles peut-être mais en supposant que c’était elle qui avait le contrôle d’Ezekiel, à quel moment avait-elle pu récupérer cette clé et où avait-elle été cachée durant tout ce temps ? Et qu’est-ce que cela signifiait du coup pour Ezekiel ?
—Donc sauf si cette Fairy peut nous faire entrer, il faut qu’on réinvoque le Jugement si on veut tirer Ezekiel de là, souligna Lucinda, manifestement très intéressée.
—Tout dépend de qui y entre, précisa Jaimie en fronçant le nez. Je sais que les Cœur Vaillants ne peuvent pas subir les effets du Jugement mais je ne suis jamais entrée dans ce lieu donc j’ignore son fonctionnement exact excepté que ce piège met du temps à agir…
—Attends, tu proposes que j’y aille ?! s’étonna Eurydice qui ne savait pas que cette possibilité existait.
—Ce n’est qu’une idée Eury et puis si tu veux y aller, je compte bien t’y accompagner, lui précisa son amie.
Cette proposition soudaine n’enchantait pas trop Gabriel et Jaimie tandis que Margaux restait obstinément silencieuse… son regard vert glissant vers Dimitri qui n’avait apparemment pas aimé ce qu’il venait d’entendre.
—Tu comptes quoi ?! fit le vampire en grinçant des dents. Est-ce que tu as bien réfléchi dans quoi tu risquais de t’engager ou bien devons-nous encore une fois parler de ce qu’il s’est passé à San Myshuno et qui aurait pu arriver à Willow Creek ?
—Qu’est-c- commença la jeune mannequin avant de se pincer l’arête du nez. Oh non… Je vois ce que tu crains… Mais je ne me suis attaquée à personne depuis un moment !
—Exact mais manque de chance, ton tatouage au henné n’a pas tenu aussi longtemps qu’Ezekiel l’avait prévu. Pour cette raison, je ne compte pas te laisser foncer quelque part sans y avoir réfléchi avant !
—Je tends à être du même avis, ajouta Margaux, l’air grave. Si l’on se précipite, cela va profiter à notre adversaire et Ezekiel va en pâtir. Personnellement, je pense que ce serait une bonne idée de prendre la nuit pour se remettre de nos émotions et y réfléchir calmement. Nos esprits seront surement plus clairs demain matin…
Gabriel approuva cette proposition, suivit par Jaimie qui leur rappela que de toute façon, elle devait retourner à Brindleton Bay pour voir sa sœur avant qu’ils ne puissent faire quoique ce soit. Ils mirent fin à leur conversation et, après le départ de la muse, le magicien leur suggéra de se reposer à l’étage s’ils le désiraient. Si Margaux avait préféré décliner cette offre pour aller prendre l’air à l’extérieur et que les vampires étaient restés silencieux, Eurydice à l’inverse accepta, réalisant qu’elle était épuisée après tous ces évènements.
Une fois que tous eurent donné leur réponse – Dimitri avait précisé qu’il voulait rester avec Lucinda pour lui parler en privé plus tard –, Gabriel la fit monter à l’étage puis usa de sa magie sur une pièce à sa gauche. Il fit ensuite signe à Eurydice d’y entrer et elle constata que c’était une chambre dont la décoration lui plaisait beaucoup – manifestement, il avait utilisé ses pouvoirs pour qu’elle ait un lieu lui correspondant car elle doutait fort que le tas de linge sale et les livres éparpillés au sol soit censés se trouver ici, même si cela ne la dépaysait pas.
Curieuse, elle inspecta la pièce du regard, voyant ci et là des choses qu’elle aimerait bien mettre dans sa propre chambre, puis en se retournant, elle se retint de pousser un cri de joie : il y avait une superbe guitare noire aux finitions métalliques impeccables qui se trouvait à côté de la porte. La main tremblante et n’osant y croire, elle posa ses doigts sur les cordes avant d’empoigner l’instrument.
Elle qui était plus habituée à sa vieille guitare reçue pour ses quinze ans, jamais elle n’aurait osé demander une pareille beauté à ses parents car cela devait coûter une fortune ! Impossible pour elle de résister à l’envie de l’essayer et très vite, ses doigts trouvèrent naturellement leur place sur les cordes et commencèrent à en tirer les premières notes.
Eurydice jouait le premier truc qui lui passait par la tête, entendant que l’instrument était correctement accordé et qu’elle ne massacrait pas le morceau comme elle avait pu le faire à ses débuts. Ainsi, elle se vidait la tête, cela au point de ne pas sentir le temps qui passait et ne pas réaliser ce qu’il se passait autour d’elle – combien de fois n’avait-elle pas entendu ses parents ou son frère entrer dans sa chambre parce qu’elle était trop prise dans sa musique pour s’apercevoir que sa porte avait grincé ?
Quand on lui toucha l’épaule, elle sursauta et se retourna pour voir Cordelia qui lui souriait en lui désignant le lit. La jeune femme reposa vite l’instrument et, un peu gênée de s’être encore une fois faite surprendre parce qu’elle était plongée dans ce qu’elle jouait, elle s’assit sur le lit, imitée par la succube.
—Excuse-moi de t’avoir dérangée, lui dit Cordelia avec un sourire amical. J’aurais dû attendre que tu ais terminé.
—Il n’y a pas de mal, la rassura Eurydice en souriant de la même manière. J’ai l’habitude et puis ma mère est un peu imprévisible quand elle m’interrompt. Elle m’a déjà lancé mes chaussettes sales parce que je n’avais pas entendu que le repas était prêt et que je n’avais pas rangé ma chambre.
—Je comprends maintenant pourquoi il y a du bazar ici…
Vu l’insistance que ces yeux verts avaient à regarder de travers ce qui trainait par terre, Cordelia était probablement quelqu’un de maniaque et la jeune femme nota dans un coin de sa tête qu’elle avait intérêt à limiter au mieux son désordre tout le temps qu’elle serait dans le Bastion Mirage.
—Je vous promets que je vais ranger, déclara-t-elle avant de grimacer. Enfin…
—C’est ta chambre, tu y fais ce que tu veux, lui dit calmement la démone. Et puis tu as le droit de me tutoyer. Ça ne me dérange pas, bien au contraire. J’avais cru comprendre que tu étais une amie d’Ezekiel.
—Oh… C’est le cas même si… C’est un peu compliqué je dirais.
—Compliqué ?
La jeune femme lâcha un soupir de dépit… avant de vider son sac sur le sujet, cela sous l’oreille attentive de Cordelia qui ne l’interrompit à aucun moment. Elle lui raconta tout depuis le début, de cette rencontre dans le parc près de chez elle à cette atroce confrontation sur les Falaises de Windenburg pour laquelle elle s’en voulait toujours. Elle n’omit pas de mentionner les deux fois où ils s’étaient bêtement rentrés dedans, les appels et SMS échangés ainsi que le fait qu’elle se sentait encore un peu frustrée qu’il ne lui ait jamais dit la vérité sur ce qu’il était.
—Oh celui-là… grommela la démone une fois qu’Eurydice eut terminé son récit. A tous les coups, il ne nous a rien dit à ton sujet pour éviter que je ne sois tentée de l’espionner. Je ne m’étonne plus qu’il rejette sa part incube cet imbécile !
—Une minute, tilta la jeune femme. V- Tu l’espionnais ?
—Pour son propre bien ! Sans ça, il aurait eu plus d’ennuis qu’il n’en a déjà, c’est certain !
Déjà que cet abruti est allé une fois à Forgotten Hollow se mêler aux autres créatures surnaturelles et aurait pu finir en casse-croute pour vampire s’il n’était pas tombé sur les Vatore ! Heureusement que je lui ai passé un savon après ça car s’il y était retourné alors que cette Jotun est dans le coin, il serait déjà congelé !
Quand elle prononça ces derniers mots, Eurydice eut l’impression de percevoir plus de peur que de colère chez Cordelia. La jeune femme chercha dans sa mémoire ce qu’elle savait sur les Jotun mais rien ne lui venait en tête sur ce sujet précis…
—Qu’est-ce qu’un… Jotun ? demanda-t-elle, intriguée. Je crois avoir déjà entendu ce mot…
—Oh… fit la démone, mal à l’aise. Pour t’expliquer cela simplement, chaque catégorie de démons possède un ennemi naturel, le plus souvent parce qu’ils chassent le même type de proie ou à cause d’un conflit de territoire. Par exemple, les vampires et les ogres sont rivaux depuis longtemps, cela même si leurs querelles se sont atténuées avec le temps depuis que les ogres ont limité leurs victimes humaines. Pour ce qui est des incubes et des succubes, nous avons la particularité d’avoir une sexualité dépendant de celle de notre partenaire du moment…
—Dépendante de l’autre ?
—Nous nous nourrissons avec la luxure donc si notre proie n’éprouve aucun désir physique pour nous, nous n’avons aucune attirance de ce genre pour elle. Pour ce qui est des Jotun, ce sont nos opposés dans ce domaine vu qu’ils sont tous asexuels et… c’est en partie ce qui fait d’eux nos ennemis naturels. Au départ, nous nous contentions de nous ignorer mutuellement mais un jour, des incubes ont eu la mauvaise idée de vouloir dévergonder les jeunes femmes de Midgard…
Eurydice vit son ainée soupirer d’agacement avant de reprendre, l’air grave.
—Je ne dirais pas qu’ils les ont violées vu comment mon espèce fonctionne mais j’admets que cela peut rester discutable, poursuivit Cordelia. Là où ils ont commis une grave erreur, c’est en engrossant ces femmes car quand un incube met enceinte une humaine, durant sa grossesse, elle se change en succube et après cela, elle ne peut plus avoir d’enfants. Lors de leur petite « sauterie », ils ont créé beaucoup de succubes et cela a fortement contrarié les Jotun qui ont éliminé tous mes pairs sur leurs territoires et jugé bon de faire de même avec tous les incubes dont ils croisaient la route. Même si Ezekiel renie cette part de lui, s’il venait à croiser cette Jotun…
… Il serait en danger de mort. Donc même s’il parvenait à sortir du Jugement, il serait menacé. La jeune femme ne pu s’empêcher d’avoir la gorge nouée en se disant que le magicien ne sera probablement jamais en sécurité…
—Je suis une mère bien pitoyable, déclara la démone, l’air triste. Incapable d’élever correctement mon fils et de le protéger…
—Permets-moi de ne pas être d’accord, lui dit fermement Eurydice. Tu as fait tout ce que tu as pu pour lui et si tu le pouvais, je suis sure que tu irais le sauver.
Le sauver… Mais le piège antique dans lequel il était enfermé ne laissait pas beaucoup d’espoir et elle n’arrivait pas à se sortir de la tête que c’était elle qui l’avait mis dedans.
—Ne te reproche rien, lui dit doucement son aînée comme si elle avait lu dans ses pensées. Tu n’avais pas le choix.
—C’est facile à dire mais… dur à accepter, admit la jeune femme en déglutissant. J’arrête pas d’y penser…
—Je comprends. Dans ce cas, que dirais-tu de me parler d’autre chose ? Si ce n’est pas indiscret, j’aimerai te connaître un peu mieux. En échange, je serais ravie de répondre à toutes tes questions, aussi futiles qu’elles puissent te paraître.
Elle accepta cette offre, voyant ainsi un moyen d’alléger un peu son cœur. Elles discutèrent de tout et de rien pendant un moment, lui donnant presque l’impression d’être avec sa mère, puis Cordelia l’avait laissée se reposer, ayant précisé qu’elle avait une dernière chose à régler avant d’aller dormir. Eurydice essaya donc de trouver le sommeil, cela même si elle se doutait qu’il risquait d’être agité…
Pendant ce temps, dans la chambre voisine, Dimitri et Lucinda avaient fait le tour de la pièce, constatant que celle-ci regorgeait de vêtements et que leurs valises ainsi que leur contenu avaient comme été rapatrié ici. En revanche, il n’y avait qu’un seul lit et un seul bureau, un détail peu gênant en soit vu que seul l’un d’eux en aurait besoin – d’ailleurs, elle était tentée de vérifier si elle pouvait toujours accéder à ses notes de cours et les montrer à Gabriel pour qu’il lui dise si celles-ci contenaient des incohérences dues aux enseignements sélectifs de Straud.
Une fois que chacun ait pris le temps de se nourrir, ils s’installèrent sur le lit et Lucinda se prépara mentalement à une longue discussion…
—Je ne suis pas fâché, lui précisa Dimitri avec calme. Je sais que c’est ton amie et que tu veux l’aider tout comme tu veux aider Ezekiel mais je veux juste que tu comprennes que tu ne dois pas foncer tête baissée.
—Je dois éviter de retomber dans mes travers de jeune démon, dit la jeune femme qui avait bien compris où était le problème. Je vais mieux depuis l’opéra et… Nigel. Seulement, j’aimerai que tu me laisses un peu faire mes preuves et voir si, seule, j’arrive à me maitriser.
—Et le Jugement serait un test de choix donc…
Vu la tête qu’il faisait, il estimait que l’épreuve qu’elle voulait s’imposer était au-delà de ses forces, ce qu’elle pouvait comprendre vu ce qu’ils savaient de ce lieu. Mais si elle ne se mettait pas en danger, comment saurait-elle si elle était prête à redevenir un peu indépendante ? Ce n’était pas qu’elle n’appréciait pas Dimitri, bien au contraire, seulement, elle ne pouvait pas se permettre de rester indéfiniment avec lui, cela même si elle avait un pincement au cœur à l’idée de s’éloigner de son ami. Elle l’avait déjà bien trop embêté…
—Si tu trouves que c’est trop… commença Lucinda, inquiète.
—Je ne t’empêcherai pas d’y aller si c’est ce que tu veux, la coupa le vampire avant de lâcher un léger soupir. En revanche, je veux que tu y réfléchisses cette nuit et, si tu es décidée, alors je te suivrai.
—Tu es sûr ?
—Certain. On ignore ce qui nous attend là-dedans alors autant que je vienne aussi.
Elle crut voir un voile sombre obscurcir le regard du vampire, comme s’il lui passait quelque chose sous silence mais celui-ci disparu aussi vite qu’il était apparu, faisant qu’elle se demanda si elle ne l’avait pas imaginé.
—En revanche, l’urgence actuelle serait plus de redonner le moral à ton amie, lui suggéra Dimitri avec justesse. Ça m’étonnerait fort que l’Outre-tombe soit fermé ce soir, surtout que tu n’as pas eu l’occasion d’en profiter pleinement.
—C’est une bonne idée, admit Lucinda qui n’y avait fait qu’un bref passage avec le vampire. Est-ce que tu comptes venir aussi ?
—Non. J’ai une chose à régler avec quelqu’un donc je ne vais pas pouvoir vous accompagner.
La jeune femme ne chercha pas à en savoir plus car après tout, il avait le droit de garder certaines choses pour lui s’il le désirait, cela même si elle était un peu curieuse. Et puis après plusieurs jours passés ensemble, cela ne pouvait pas être une mauvaise chose de se séparer pour quelques heures. En revanche, elle comptait bien profiter qu’il était là pour fouiller un peu ce placard car si elle devait sortir, elle allait devoir se trouver une tenue plus appropriée pour l’occasion.
Chez les Vatore, les deux vampires pouvaient enfin se reposer après avoir dû lutter contre les démons mineurs… et aider Cordelia Magenta dans sa « petite » vengeance contre Straud pour avoir voulu contourner les termes d’une sorte de pacte dont ils avaient préféré ne rien savoir – Caleb avait profité de la situation pour récupérer les biens de son père, Louis Vatore, que leur ennemi leur avait dérobé il y a bien longtemps. Lilith avait terminé de se régénérer quand elle entendit entrer son frère.
—Je vois que toi aussi tu as retrouvé toutes tes forces, constata-il avec le sourire.
—Mes articulations sont encore un peu douloureuses mais ça passera d’ici une heure ou deux, dit-elle en gardant ses yeux fixés sur le tableau de sa chambre.
Caleb suivit son regard jusqu’à cette peinture dont le modèle lui était à la fois très familier et de plus en plus lointain avec les années qui passaient.
—Mère… souffla-t-il face à cette toile représentant leur mère quand elle était plus jeune. Cela fait déjà si longtemps qu’elle n’est plus des nôtres…
—Je ne pense pas qu’elle soit triste là où elle se trouve tu sais, dit Lilith avec douceur. Du moins, plus maintenant. Nous sommes des vampires redoutés à présent et en prime, nous avons réussi à toujours nous adapter à notre temps.
—Ça, c’est certain. Le nombre de petits boulots que nous avons pu faire toi et moi sans que quiconque ne suspecte notre vraie nature est très parlant !
Même s’ils ne payaient pas beaucoup de factures à Forgotten Hollow, il fallait tout de même s’assurer des revenus, un problème commun à toutes les créatures surnaturelles vivant dans cette vallée où le soleil brillait peu. Certains d’entre eux avaient la chance, comme Kate Frost, d’avoir des compétences pointues avec diplômes à l’appui, faisant qu’ils avaient un travail bien rémunéré dans un domaine particulier. Pour les autres, il fallait se débrouiller et généralement, c’était vers le secteur de l’hôtellerie, souvent en pénurie de personnel qualifié ou non, qu’ils se tournaient – l’avantage d’être un vampire était que bosser de nuit était très arrangeant là où de simples humains préféraient éviter ces horaires qu’ils trouvaient contraignants.
—J’imagine que tu n’es pas venu voir comment je me portais, supposa Lilith avec justesse en voyant le sourire crispé de son cadet. Tu as fouillé nos dernières trouvailles je présume.
—Je n’arrivais pas à dormir, précisa Caleb en grinçant un peu des dents. Et puis j’avoue que je pensais, via les notes de père, qu’il n’y avait que des objets pour pratiquer la magie.
Ces derniers mots l’intriguèrent. Dans ses souvenirs, leur père avait écrit dans un de ses journaux intimes que Straud lui avait dérobé des objets qui avaient appartenus à Viktor d’Avalon en précisant juste qu’ils servaient pour ceux étant capables d’user de la magie. Aurait-il manqué quelque chose ?
—Qu’est-ce que tu as trouvé ? demanda Lilith, curieuse.
—Pour la défense de père, il est possible qu’il ignorait son existence, déclara Caleb avec sérieux. Un des grimoires n’en était pas tout à fait un : c’était en fait un journal intime écrit avec une encre qui ne devient visible qu’avec la chaleur d’une flamme. Je trouvais étrange que certains sorts soient en double…
—Qui est son auteur ?
—Viktor d’Avalon apparemment. Vu ce que j’ai lu des notes de père sur l’époque d’Avalon et le contenu de ce que ce Viktor a écrit, je peux attester qu’il ne tenait vraiment pas à ce qu’on le trouve pour pas mal de raisons…
A la manière dont son cadet s’exprimait, elle le suspectait d’avoir une certaine empathie pour cette personne. Ils devaient donc avoir des points communs…
—Si je me fis à sa façon d’écrire et aux dates, il a commencé à l’écrire dans son adolescence pour ne pas que son père le lise et découvre qu’il était homosexuel, poursuivit Caleb avec gravité. Il n’était pas très régulier, probablement parce qu’il essayait aussi de cacher ce grimoire à une femme qu’il nommait « Bérénice » et qu’il décrit… bizarrement.
—Bizarrement ? répéta Lilith qui trouvait ce choix de mot étrange. Vu que tu me dis qu’il était gay, il est impossible qu’il ait été attiré par elle…
—Je dirais que c’est plus parce qu’il ne savait pas trop quoi penser d’elle. Tantôt elle était aux côtés de son père, tantôt elle faisait preuve d’une incroyable empathie avec lui. Il n’arrivait pas à la cerner durant tout le temps où elle était en Avalon et la dernière fois où il l’a vue, c’était quelques jours avant que le bateau sur lequel elle était avec son père ne sombre. En revanche, dans sa dernière entrée, il la mentionne de nouveau en disant qu’il ne la laissera jamais arriver à ses fins.
—… Tu ne viens pas de sous-entendre qu’elle était morte noyée ?
—Oui. J’ai vérifié les notes de père et il mentionne bien cette femme lui aussi… et pas en bien. Il la décrit comme un être bien plus fourbe qu’elle ne le laisse paraitre. Je n’ai pas encore tout parcouru mais je vais arriver au bout.
—Je vais t’y aider. On ne sera pas trop de deux je pense…
Et puis Lilith voulait savoir ce que Straud avait bien pu chercher dans tout cela pour y avoir dérobé à leur père…
Après une longue sieste, Eurydice avait senti son estomac gargouiller et était sortie de sa chambre pour voir si elle pouvait trouver de quoi manger – elle espérait juste ne pas devoir cuisiner car elle n’était pas tentée de bruler par accident la demeure de leurs hôtes. Elle s’apprêtait à descendre quand elle vit Margaux à travers les carreaux de ce qui ressemblait à une salle de musique.
En s’approchant, elle vit que la magicienne n’était pas seule et reconnut Jaimie qui était face à elle, visiblement contrariée.
—Perdu ? fit Margaux en grinçant des dents. Donc on ne peut pas pénétrer dans le Jugement par ce biais…
—J’en ai bien peur… grogna la muse en se massant les tempes. Fairy est en train de passer Brindleton Bay au peigne fin pour retrouver le Camée de Perséphone mais comme elle a dû crapahuter partout pour neutraliser des démons mineurs, ça va lui prendre pas mal de temps.
—Et nous n’en possédons pas beaucoup…
—D’après elle, cela dépendra surtout de la gravité des crimes dont Ezekiel est accusé et le Jugement est du genre à chercher loin…
Intriguée, Eurydice se rapprocha encore pour suivre le reste de la conversation…
—Loin ? tiqua Margaux. A quel point ?
—Tout ce que la personne a pu faire et qui a pu nuire de quelque façon que ce soit, répondit Jaimie. Cela peut aller d’un petit mensonge à un meurtre, voire même de choses dont la personne n’était même pas consciente. Fairy a été assez catégorique sur le fait que le Jugement était tordu mais sauf quelques exceptions, tout le monde peut en sortir, même ceux qui ont échoués.
—Et les exceptions correspondent à la Corruption j’imagine.
—J’en ai bien peur. En ce sens, le Jugement semble rejoindre l’Epreuve qui annihile toute Corruption qui tente d’y pénétrer mais ce serait à vérifier. En revanche, Fairy m’a bien confirmé que c’était l’âme qui était jugée donc si Ezekiel était possédé par quelqu’un…
—Cette âme aussi devra subir le Jugement. Donc si l’un de nous s’y rend, il doit se préparer à faire face à l’ennemi.
—C’est ce que je crains… Surtout que maintenant, je suis certaine de qui tire vraiment les ficelles car après enquête, il semble que plusieurs portails aient été ouverts, y compris dans des lieux qu’Ezekiel n’a assurément jamais visités. Je ne sais pas ce qu’elle a voulu y faire passer mais ce n’est pas une bonne nouvelle pour nous.
D’autres portails ? Et leur ennemi était une femme ? Maintenant qu’Eurydice y pensait, Jaimie n’avait pas mentionné qu’une des clés du Jugement avait été volée ? Elle vit la muse s’installer sur le piano en soupirant et dut tendre l’oreille pour entendre la suite, en partie couverte par les quelques notes qui résonnaient.
—Bérénice, celle qui arrive toujours à se glisser entre les mailles du filet après avoir semé le chaos sur son passage, déclara Jaimie en jouant ce qui ressemblait à une sonate de Beethoven. Teresa a été la première à avoir des doutes sur elle et elle cherchait à protéger Viktor d’elle. Seulement, Xanthe l’a séparée de son frère et il est devenu une proie facile pour cette femme. Quant au prétendu suicide de Teresa, elle n’aurait jamais fait ça. C’est forcément un coup de Bérénice pour affaiblir la psyché de Viktor. Joshua était fou quand l’Eglise a fait barrage pour qu’il rapatrie le corps de sa cousine en Avalon…
—Vous étiez proche du Téméraire, ça s’entend, constata Margaux. Peu de personnes le tutoyait, même quand il le demandait.
La muse interrompit sa musique avant d’émettre un léger rire et de soupirer de dépit.
—Joshua était quelqu’un de bien, finit-elle par dire avec tristesse. Seulement, je me doute qu’il est mort avec de nombreux regrets comme ne pas avoir pu protéger Viktor et Teresa ou ne pas avoir pu voir grandir Iris. J’ai fais ce que j’ai pu pour traquer Bérénice mais j’étais bien trop faible pour lui tenir tête et mon erreur a été d’en parler à Iris. Je ne l’ai su que quand Gabriel a voulu user du sort d’immortalité et que nous avons tous deux appris que le prix pour ce sort avait déjà été payé pour lui… A tous les coups, c’est ce qui a fini par la tuer.
Un silence se fit dans la salle de musique durant de longues secondes… jusqu’à ce que la magicienne le brisa.
—Vous n’êtes pas la seule à avoir commis de graves erreurs, précisa Margaux en grimaçant. J’ai été trop aveugle pour voir que Viktor était dangereux et j’aurais été plus prudente, je ne me serais pas faite avoir. Si le Téméraire ne m’avait pas ramenée à la raison, qui sait ce qu’il se serait passé…
Eurydice vit les deux femmes échanger un long regard, comme si à présent, elles ne communiquaient plus que par télépathie. Puis la muse finit par se lever et se placer face à la magicienne.
—Le passé est le passé et nous ne pouvons plus rien y changer, dit Jaimie dont la tristesse était toujours perceptible. Nous avons toutes deux beaucoup perdu et il nous incombe à présent d’essayer de sauver ce qui peut l’être tout en contrecarrant au possible les plans de Bérénice.
—Qui risque de ne pas être seule, souligna Margaux avec gravité. Je pense que nous sommes d’accord pour penser que ce n’est pas de la Corruption qui a traversé mais des individus dont nous ignorons tout et qui vont certainement nous poser des soucis…
—Oui. Pour cette raison, il est plus que temps que nous unissions nos forces au lieu de nous disperser comme nous le faisions jusqu’ici. Ça ne sera pas simple mais si l’on veut avoir une chance de gagner, c’est notre meilleur espoir.
Sur ce point, Eurydice était entièrement d’accord : ils devaient tous s’unir pour vaincre l’ennemie. Seulement, allaient-ils pouvoir sauver Ezekiel à temps ? La dernière fois, elle n’avait rien pu faire alors comment allait-elle pouvoir lutter le moment venu ?
—Il reste cependant quelques points obscurs, ajouta Jaimie avec gravité. En supposant que ma sœur n’était effectivement pas près de vous lors du sort de résurrection, où était-elle ? La seule raison pour laquelle elle se soit rendue à Avalon, c’est qu’elle devait me chercher ou qu’elle a su pour Iris.
—Je pencherais pour la seconde option, précisa Margaux en fronçant le nez. Elle tournait autour du château quand je l’ai rencontrée et elle voulait voir le Téméraire. Elle n’a jamais voulu en dire plus, juste que c’était privé et que je ne devais pas prononcer son vrai nom si je venais à le découvrir.
—Pour ne pas attirer Calliope… C’était le jour de la chute d’Avalon ?
—Plusieurs jours avant. Je suspecte même qu’elle est restée dans les parages en permanence car elle avait repéré Eurydice mais j’ignore ce qu’elle a fait exactement à part qu’elle a mentionné ne pas avoir eu tout ce qu’elle voulait.
Eurydice essaya de se remémorer les paroles exactes de la muse comme Margaux l’avait montré dans ses souvenirs mais les seuls détails qui lui revinrent était que Fairy s’était montrée évasive sur plusieurs choses. La jeune femme commençait à se demander ce que la muse avait pu découvrir durant son séjour à Avalon et qu’elle n’était plus en mesure de partager avec eux…
… et puis elle se souvint d’autre chose : le fait que Viktor – ou du moins Bérénice car ça devait être elle la coupable – se soit évertué à masquer les traces de sa sœur Teresa. Elle avait trouvé cela suspect et elle ajouta à cela la charmante malédiction dont elle avait été affublée ainsi que ce piège tendu à Sirius, Selena et Farah… Pourquoi tantôt, Bérénice la voulait vivante et après morte ? Ça n’avait aucun sens ! Ou bien était-ce un signe qu’elle n’avait pas totalement prit le dessus sur Viktor ?
Si c’était le cas, était-il possible que l’âme de Viktor d’Avalon ait réussi à survivre pendant tout ce temps ?
Et si oui, alors lui aussi était en train de faire face au Jugement…
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